« Laissez donc la Chine dormir, car lorsque la Chine s’éveillera le monde entier tremblera ». Napoléon aurait proféré ces mots prophétiques en 1816 à Sainte Hélène. Alain Peyrefitte, plusieurs fois ministre, s’est saisi de cette phrase pour en faire le titre de son livre en 1973 qui explique que « la Chine d’aujourd’hui ne prend son sens que si on la met en perspective avec la Chine d’hier ». Sa thèse principale est que compte-tenu de la taille et la croissance de la population chinoise, elle finira inexorablement par s’imposer au reste du monde dès qu’elle maîtrisera une technologie suffisante.
Trente ans après, nous savons à quoi nous en tenir.
Nous vous faisons connaître aujourd’hui un livre surprenant du grand journaliste reporter Albert Londres (1881-1932), paru neuf ans avant sa mort et relatant des faits qui n’ont pas encore un siècle.
Ce reportage enlevé à fière allure, intitulé La Chine en folie, choses vues est composé de huit chapitres qui se succèdent dans cet ordre : La Chine en folie, Fantastique histoire de Tsang-Tso-lin, Une assez curieuse journée à Pékin, Une conversation inattendue, Où il faut huit démarches pour voir clair, L’éloge de l’anarchie, Une veillée d’armes à la chinoise, Un monstre : Shanghaï.
Albert Londres n’épargne rien. Pas un mot gentil à l’égard des Chinois ! Il a même des entretiens avec un dictateur coupeur de têtes !
« Chine : chaos, éclat de rire devant le droit de l’homme, mises à sac, rançons, viols. Un mobile : l’argent. Un but : l’or. Une adoration : la richesse. »
« Si vous désirez rajeunir, soyez satisfaits : nous retournons à sept siècles en arrière. Le territoire est livré aux grandes compagnies. Nous sommes revenus à l’époque de Du Guesclin, mais Du Guesclin n’apparaît pas !
Vingt et une provinces, vingt et un tyrans Les villages moins malins sont ravagés. Les dames qui ont horreur de l’imprévu dans le plaisir se jettent dans les puits pour échapper au rut déchaîné. (Que les puits sont étroits ! Qu’elles doivent avoir de petits corps !)
Il ouvre une porte, les otages sont alignés.
- Où est ta femme ? Celle-ci ? Parfait.
De son sabre, il la coupe en deux.
Voici ta part, quand tu rapporteras cinquante dollars, tu auras l’autre moitié. »
SI la satire, l’humour noir et l’outrance désinvolte n’étaient répandus, la lecture serait insoutenable mais quelle richesse de documents pour un historien !