La Folie d'Albert (Livre numérique Google)
Fin des années 1950, dans la région du Velay.
Une famille disloquée à la suite de la mort du père, riche fermier.
Le fils, qui, seul, rumine sa vengeance...
« Neige de l’Avent dure longtemps, dit le proverbe. Certes... Mais chez nous, passé le premier de l’an, quand la neige commence à tomber, c’est en général très fort et pour un bout de temps. Ce premier mardi de janvier 1959, Albert Carrot aurait dû s’en souvenir en attelant le Gris au tombereau pour aller débarder quelques pins abattus en bonne lune, l’avant-veille de Noël, sur le replat de la Virolette. Il aurait dû se douter, en passant le collier au cou du grand percheron, que ces quelques flocons qui tombaient sans conviction d’un ciel de granit poli, voletaient autour de lui, et fondaient dans le poil de l’animal encore chaud de l’écurie, annonçaient la tempête. Et si les flocons n’avaient pas suffi à l’alerter, le bruit mat, comme étouffé, qu’émirent les longues chaînes qu’il jeta au fond du tombereau aurait dû le faire. C’est sûr, Albert aurait mieux fait de rester chez lui, ce jour-là. »
Au village de Tournac, les Carrot, fermiers et propriétaires terriens de père en fils depuis des générations, dépositaires d’un grand savoir-faire et de fortes valeurs familiales, sont des hommes à craindre et à respecter.
Lors d’une violente tempête, en janvier 1959, Albert Carrot meurt, tombé d’une falaise, le crâne fracassé. C’est la stupéfaction, la fin d’un cycle et le deuil pour Germaine, l’épouse digne, en charge dorénavant d’un vaste domaine « de très loin le plus gros et le plus riche de Tournac, et probablement du canton», pour Claude, frère cadet d’Albert, l’éternel second, et surtout pour Albert fils, l’héritier de vingt ans.
Dès lors, dans la ferme où pourtant les travaux des champs, l’entretien des bêtes régulent la vie mieux qu’une horloge, se joue un implacable huis-clos régenté par l’esprit troublé du jeune Albert qui, du soupçon au délire, cède à un terrible besoin de vengeance...