« Un groupe de jeunes filles avec leurs fichus de crêpe aux mille couleurs, un paquet d’œillets dans les cheveux : elles jouent, du tambour de basque, babillent, rient et crient tout en poussant, comme des folles, la balançoire suspendue aux deux arbres. Les garçons de la taverne vont et viennent avec des plaleaux chargés de mançanilla et d’assiettes d’olives. Des gens du peuple, groupés en bandes, fourmillent sur la route. » (La Taverne des chats).
« Ses cheveux se hérissèrent d’horreur. Il venait de voir, sous des capuchons relevés, les mâchoires décharnées, les blanches dents, les noires cavités des yeux de têtes de morts, et à moitié couverts de vêtements en lambeaux, les squelettes des moines précipités jadis, du portail de l’église dans le gouffre. » (Le Miserere).
Ces deux extraits des Légendes espagnoles donnent la mesure du talent évocateur du poète et conteur romantique Gustavo Adolfo Bécquer (1836-1870). Excellant à décrire une scène en quelques paroles, avec finesse et précision, il crée des histoires où se mêlent aux légendes séculaires, le surnaturel, la magie et la recherche de l’impossible, sur fond de rues ténébreuses, cloîtres gothiques et fontaines enchantées…
Traduction : Achille Fouquier (1817-1895?).