A la gare c'était la cohue et l'agitation. Une queue se forma devant la
caisse. Le hall résonnait de cris et de pleurs de nourrissons... "
Regardez-moi cette foule. Comment peut-on acheter son billet ? Des tas
de mômes, carrément. Là-bas, il y a une vieille peau, avec un bébé elle
aussi. Pouah ! Il y en a un qui s'est laissé tenter, faut être dingue !
-Aujourd'hui on n'y regarde pas. -Prends un bébé, mon bonhomme, tu
pourras passer devant, fit une bonne femme, propriétaire de deux
nourrissons. -Ah, bordel... Je suis bien obligé. Combien que ça coûte ?
-C'est partout le même prix, quatre mille... " Panteleïmon Romanov est
un des rares écrivains russes à avoir créé une gamme aussi étendue de
perceptions et de sentiments. Il manie avec une étonnante perfection
différents styles d'écriture : parfois on croit reconnaître Anton
Tchekhov dans ses descriptions de la nature, des amours impossibles, parfois l'humour grinçant de Mikhaïl Zochtchenko dans les petites scènes de la vie quotidienne, à la gare, dans une file d'attente, devant une boutique vide... Les nouvelles de Panteleïmon Romanov, " Chroniques de la
Russie des années vingt ", drôles ou tragiques, mais à l'ironie toujours
mordante et à l'humour dévastateur, sont unies par le même thème :
l'ambiance des années vingt en Russie. Elles reflètent l 'époque du "
communisme de guerre " et celle de la NEP (Nouvelle Economie Politique).